Streaming – La question à trente piasses !

Par Diane Tell

Tout le monde en parle ici. Une info a marqué les esprits Québécois au point de se retrouver sur toutes les lèvres. On ne peut pas y couper. Presse, radio, TV, conversations privées… La « question à 30 piasses » revient sans cesse.  Premier lancé de pavé dans la flaque en novembre 2015 … (cliquez sur les titres pour lire à la source)

Sandy Boutin ne perd pas foi en l’industrie de la musique

Vendredi 6 novembre 2015  – Radio Canada

Car même pour les artistes les plus populaires, les redevances provenant des écoutes numériques sont minimes. Sandy Boutin prend l’exemple de la chanson Paradis City de Jean Leloup sur Spotify.

« On voit que Paradis City a été écouté plus de 262 000 fois. Avec la rémunération au Canada qui est de 10,2 cents par 1000 écoutes, ça veut dire que la chanson rapporte 26 $. » Sandy Boutin

Un buffet qui laisse des miettes pour les artistes

Le 2 avril 2016 |Guillaume Bourgault-Côté | LE DEVOIR

 Le chiffre fait image. En 2015, les quelque 540 000 écoutes Spotify de la chanson Paradis City de Jean Leloup lui auront rapporté… un peu moins de 30 $ pour ses droits d’interprète.

Après Jean Leloup… Katy Perry et Christina Aguilera

Les défis du PQ

Le 1 octobre 2016 |Marie-Michèle Sioui | LE DEVOIR

Sur la scène musicale, le nerf de la guerre s’appelle streaming, ou écoute en continu. Les Canadiens (et les Québécois, et le reste des habitants de la planète) ont délaissé les disques matériels, puis les albums et pistes numériques. Le roi, c’est le streaming, mais il ne rapporte presque rien aux artistes. L’exemple de la pièce À Paradis City, de Jean Leloup, a marqué les esprits : les 540 000 écoutes Spotify de la chanson ont rapporté un peu moins de 30 $ à l’artiste pour ses droits d’interprète.

L’ADISQ demande 15 millions à Québec

Jeudi 29 septembre 2016 – BLOGUE LA PRESSE – Emilie Côté

Selon la directrice générale Solange Drouin et le président Claude Larivée, le modèle dominant du streaming “empêche nos artistes de vivre de leur art et nos entreprises de se développer”. “Nous fonçons verre un mur”.

Musique enregistrée: qui doit-on aider ?

Vendredi 30 septembre 2016 – La Presse – Alain Brunet

Dans le contexte de la mutation des habitudes d’écoute musicale et du déclin dramatique des ventes de musique numérique, l’Association québécoise de l’industrie du disque, du spectacle et de la vidéo (ADISQ) a exigé jeudi une aide gouvernementale d’urgence de 15 millions de dollars répartie sur deux ans, rapportait la Presse canadienne.

Ma collègue Émilie Côté a aussi rédigé un blogue sur la question, c’est dire l’intérêt qu’y portent les journalistes de musique.

On en discute depuis quelques jours, le modèle d’affaires de la vente ou de l’écoute en continu (streaming) de la musique enregistrée ne lève pas, il ne cesse de s’écrouler. À l’évidence, ce modèle ne décollera pas pour de bon tant et aussi longtemps que des redevances faméliques de l’enregistrement resteront ce qu’elles sont, et que la concentration hallucinante des revenus restera telle qu’elle est aujourd’hui.

Cri d’alarme de l’ADISQ

Jeudi, 22 septembre 2016 – Raphaël Gendron-Martin –Journal de Montréal

L’industrie du disque menacée par la montée du streaming

La montée en flèche des services d’écoute en continu (streaming) comme Spotify nuit à l’industrie de la musique d’ici.

(PS : Rendons à César, le journaliste du Journal de Montréal ne pose pas la question à 30 piasses dans son article. Les chiffres cités par Raphaël sont plus réalistes…)

SAUF QUE

Voyons les faits et regardons mes décomptes personnels.

Les plateformes (Spotify, Apple Music…) versent : 70% de leurs revenus aux ayants-droits dont 60% aux : Artistes,  Producteurs, Labels, Distributeurs  et 10% aux Editeurs, Auteurs, Compositeurs.

p.s.(En moyenne. Proportions variables en fonction des territoires, des deals, des modèles etc. YouTube étant un cas à part)

Le distributeur de Phonogrammes (IDOL, Believe Digital, Select…) reverse plus ou « rarement » moins 70% au Label responsable de la rémunération les artistes.

Voici un résumé du décompte royalties Tuta Music (mon Label) d’octobre 2016 pour un seul mois de Streaming et Téléchargements. Revenus en provenance des plateformes Spotify, Apple Music, Deezer, YouTube, etc toutes versions Premium, Freemium, Bundle etc. À noter que ces versements sont effectués une fois la part du distributeur IDOL, les droits d’auteurs et d’éditions acquittés. Autrement dit, ce décompte représente la côte-part Label/Producteur/Artiste/Interprète. J’ai la chance d’avoir mon propre Label alors je touche directement 100% de ces sommes.
capture-decran-2016-10-07-a-10-19-50Revenus Streaming  – 245 258 écoutes = 903.82$. Je reçois 12 décomptes comme celui-ci par an.

D’après ce décompte du mois d’octobre 2016, 500 000 écoutes en streaming, toutes plateformes confondues rapportent un peu plus de 1 800 $.

Si Jean Leloup ne reçoit que 30 piasses pour le même nombre d’écoutes, il reste 1 770 $ pour ses collaborateurs/administrateurs.

J’ai fait le même calcul avec les écoutes en streaming exclusivement Canadienne – le territoire pouvant jouer sur les revenus – j’arrive presque aux mêmes proportions : revenus par tranche de 1000 streaming. Par contre, je constate qu’au Canada, le modèle tarde à séduire le public. Peut-être que la mauvaise image donnée au streaming y est pour quelque chose…. Dommage.

Regardez la carte qui correspond aux streaming (un peu plus de 2 millions) des titres de mon catalogue par territoire ces 5 dernières années. Moins de 10% pour le Canada. Les seuls pays où ma musique n’est pas écoutée sont en gris.capture-decran-2016-10-07-a-10-55-16Regardez maintenant la progression pour le même catalogue et la même période (au 1er octobre 2016).capture-decran-2016-10-07-a-10-53-38Je suis distribuée par IDOL depuis décembre 2011. Actuellement, je perçois les revenus de plus de 3 000 écoutes en streaming par jour. En progression… Pourtant je n’ai pas sorti de nouvel album depuis 2013 et l’année n’est pas terminée. Si vous avez jeté un oeil attentif au décompte Tuta, vous avez constaté que les écoutes effectuées par les abonnés Premium génèrent beaucoup plus de revenus. Dans le monde, de plus en plus de gens s’abonnent et c’est tant mieux pour les ayants-droits.capture-decran-2016-10-03-a-12-54-17100 millions d’abonnés = 8.4 milliards $ annuel versés par les plateformes aux ayants-droits et on en est qu’au début. Regardez la progression de Spotify.capture-decran-2016-10-03-a-12-48-11Si après tout ceci, vous restez pessimiste… contactez un spécialiste ! Voilà ma réponse courte à la question à 30 piasses !

Le « streaming », c’est l’avenir de l’industrie musicale, selon Diane Tell

Publié le mardi 11 octobre 2016

La chanteuse Diane Tell ne comprend pas le pessimisme qui s’est emparé de l’industrie de la musique au Québec avec la montée en force de la diffusion de musique en continu, ce qu’on nomme en anglais streaming.

 

Un texte de Gérald FillionTwitterCourriel

 

L’artiste québécoise, aujourd’hui établie en France, est d’avis que le problème se situe ailleurs et qu’il faut plutôt s’adapter à la nouvelle donne économique qui s’installe dans l’industrie et saisir les occasions qui se présentent.

« Ce que je regrette, a-t-elle dit à RDI économie, c’est que, souvent, dans les contrats, le streaming est laissé pour compte. » Selon Diane Tell, les jeunes se font dire que la diffusion en ligne ne vaut pas la peine, que ce n’est pas payant. « Moi, je dis : faux. Là, c’est faux. Le streaming, c’est l’argent de ces plateformes qui sont en extraordinaire évolution. Aujourd’hui, le streaming, c’est 100 millions d’abonnés sur la planète, ce n’est que le début. C’est l’avenir de l’industrie, il faut le soutenir. »

Diane Tell reconnaît que le modèle de la diffusion en continu est intéressant pour des artistes qui sont actifs depuis un certain temps, qui ont un bon catalogue de musique et qui sont propriétaires de leurs droits. « Si j’ai un conseil à donner à un jeune artiste, c’est : « Faites attention à vos contrats. Signez avec des gens avec qui vous vous entendez bien, mais essayez de ne pas signer pour la vie! » »

Il y aura toujours des albums physiques, comme les vinyles, qui connaissent un regain de popularité, mais l’avenir appartient à la diffusion en continu, dit Diane Tell, qui prépare, depuis quelque temps, un livre qui sera publié à la mi-2017 et qui porte sur le nouveau modèle économique de son industrie. Le titre est déjà trouvé : Diane cause musique – le commerce de la musique vu de la niche. Plusieurs de ses réflexions et de ses calculs se trouvent d’ailleurs déjà sur le web.

L’enjeu véritable, selon Diane Tell, c’est la rémunération des artistes dans la chaîne de distribution du monde de la musique. Elle croit que l’enjeu premier, c’est le contrôle des droits sur la musique par les artistes. Les plateformes comme Spotify et Apple Music versent jusqu’à 70 % de leurs revenus aux ayants droit (artistes, producteurs, distributeurs, éditeurs, auteurs, compositeurs), écrit-elle, mais en fin de compte, très peu d’argent revient aux interprètes.

Jean Leloup illustre bien le problème : il n’a reçu que 30 $ pour 540 000 écoutes sur Spotify.

Diane Tell a calculé que, sur 245 000 écoutes en continu de ses chansons en août, elle a touché 904 $. Son modèle, c’est de s’assurer de recevoir 100 % des redevances provenant des plateformes de diffusion en continu. Elle est propriétaire de sa propre maison de production et d’édition de musique, ce qui lui permet d’augmenter de façon substantielle ses revenus provenant de la diffusion en continu.

Si Diane Tell touche un peu plus de 900 $ pour près de 250 000 écoutes, on peut imaginer que Jean Leloup pourrait toucher plus de 1800 $ pour ses 540 000 écoutes en continu. Or, s’il n’a que 30 $, c’est parce qu’il laisse à ses collaborateurs et administrateurs le reste des sommes, selon Diane Tell. Et il est là, l’enjeu, selon la chanteuse abitibienne.

Calculs et visions

« Ce qui est difficile pour un artiste québécois, affirme Diane Tell, c’est que le modèle n’est pas très développé au Canada. […] On est en retard par rapport à l’Europe, par rapport même à l’Amérique du Nord. »

Selon l’ADISQ, il faut 1613 achats sur iTunes pour qu’une chanson rapporte 1000 $ à un artiste québécois. Mais, il faut 830 000 écoutes sur Spotify pour arriver au même montant. L’écart est grand, c’est vrai.

Diane Tell affirme toutefois que ces plateformes permettent une diffusion exceptionnelle des chansons. Cela fait en sorte que, dans son cas, elle reçoit présentement des revenus provenant de 3000 écoutes en continu par jour alors qu’elle n’a pas sorti d’albums depuis 2013.

L’ADISQ réclame une intervention des gouvernements pour s’assurer que les plateformes de musiques et les distributeurs comme Bell et Vidéotron paient des redevances plus élevées à l’industrie de la musique.

Écoute en continu pour les chansons de Diane Tell

Août 2016

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